Plusieurs expos parisiennes fêtent cet hiver le centenaire de la crue de 1910, « à l’heure où les scientifiques prévoient prochainement à Paris une crue de grande ampleur » comme l’annonce l’exposition qui se tient jusqu’au 7 mars au Louvre des Antiquaires (entrée à côté du 151, rue Saint-Honoré)…De quoi frissonner au chaud et au sec, gratuitement qui plus est.
L’expo présente des reproductions de photos extraites du numéro spécial du Journal des Débats publié après la crue, qui dura de mi-janvier à mi-mars 1910. Les photos sont accompagnées de commentaires d’époque assez savoureux, entre considérations esthétiques - l’adjectif « pittoresque » revient plusieurs fois - et personnalisation de la Seine, insatiable curieuse partant à la découverte de quartiers où elle ne s’aventure pas d’ordinaire, « appâtée » par les rues désertes, noyant les boulevards dans son « étreinte ».
Les commentaires nous donnent l’impression d’une bonne humeur générale, alliée à une entraide et une débrouillardise qui permettent de faire face à la catastrophe et aux destructions. Les dégâts, pourtant importants - maisons menaçant ruine, chaussées qui s’affaissent à cause de l’eau qui envahit les tunnels du métro et endommage ses structures - passent ainsi au second plan. L’inondation n’aurait d’ailleurs fait qu’une victime, un facteur. La cocasserie de la photo prise Rue du Bac (bien nommée) où les habitants du quartier semblent défiler sur une passerelle haute comme un podium, bonnes et dames élégantes mêlées, témoigne de cette ambiance presque joyeuse.
D’autres photos ont des accents pictorialistes et rappellent certains Monet ou Caillebotte, comme celle de la passerelle qui rejoint les deux rives de la Seine aux Invalides, un des principaux points de passage avec le pont Sully. Le gris pâle du dôme dont l’or luit faiblement émerge de la sombre ligne veloutée des parapluies, ajoutant une note poétique à la dimension documentaire du cliché.
Le regard des photographes qui affluent dans la capitale est chargé de références à des monuments antiques, comme en témoigne la photo de la gare d’Orsay dont la voûte à caissons se reflète dans un miroir d’eau, évocation des thermes de Caracalla ou de la basilique de Maxence à Rome.
Ils mettent l’accent est mis sur les métamorphoses de Paris, vénitienne dans l’étroite Rue de Bièvre, romaine dans la gare d’Orsay, fantastique ailleurs, avec ces pavés flottants qui créent une nouvelle ligne de sol ou bien l’eau jaillissant en cascade des bouches de métro devant la gare Saint-Lazare.
L’anecdotique trouve toutefois sa place dans cette nouvelle physionomie, comme cette photo de déchets ménagers arrêtés par le tablier d’un pont, parmi lesquels les taches claires des pelures d’orange attirent tout de suite l’œil. Même les problèmes les plus délicats posés par l’inondation, comme l’évacuation des ordures, deviennent poétiques une fois esthétisés par l’œil des photographes.
Les modèles guillerets des photos semblent indiquer que malgré les difficultés du quotidien, une partie des habitants au moins avait conscience de vivre un moment historique. Certains ont peut-être posé sur ces paysages noyés un regard proche de celui des photographes « envoyés spéciaux ». Ainsi cet homme peignant derrière son chevalet planté sur une plage de limon quai des Grands Augustins, où les péniches, portées par le niveau de l’eau, dressent leurs longues coques sombres derrière le haut parapet et jettent un coup d’œil curieux, prêtes à passer de l’autre côté.
Ce n’est ni la nouveauté du phénomène ni son ampleur qui font de la crue de 1910 une première mais l’irruption du photo-reportage dont la dimension lucrative n’échappa pas au Journal des Débats. L’actualité brûlante une fois refroidie et la soif de sensationnel ayant trouvé d’autres objets, l’intérêt documentaire et esthétique demeure, le fantasme, devenu réalité pendant quelques semaines, d’une ville noyée.
L’expo présente des reproductions de photos extraites du numéro spécial du Journal des Débats publié après la crue, qui dura de mi-janvier à mi-mars 1910. Les photos sont accompagnées de commentaires d’époque assez savoureux, entre considérations esthétiques - l’adjectif « pittoresque » revient plusieurs fois - et personnalisation de la Seine, insatiable curieuse partant à la découverte de quartiers où elle ne s’aventure pas d’ordinaire, « appâtée » par les rues désertes, noyant les boulevards dans son « étreinte ».
Les commentaires nous donnent l’impression d’une bonne humeur générale, alliée à une entraide et une débrouillardise qui permettent de faire face à la catastrophe et aux destructions. Les dégâts, pourtant importants - maisons menaçant ruine, chaussées qui s’affaissent à cause de l’eau qui envahit les tunnels du métro et endommage ses structures - passent ainsi au second plan. L’inondation n’aurait d’ailleurs fait qu’une victime, un facteur. La cocasserie de la photo prise Rue du Bac (bien nommée) où les habitants du quartier semblent défiler sur une passerelle haute comme un podium, bonnes et dames élégantes mêlées, témoigne de cette ambiance presque joyeuse.
D’autres photos ont des accents pictorialistes et rappellent certains Monet ou Caillebotte, comme celle de la passerelle qui rejoint les deux rives de la Seine aux Invalides, un des principaux points de passage avec le pont Sully. Le gris pâle du dôme dont l’or luit faiblement émerge de la sombre ligne veloutée des parapluies, ajoutant une note poétique à la dimension documentaire du cliché.
Le regard des photographes qui affluent dans la capitale est chargé de références à des monuments antiques, comme en témoigne la photo de la gare d’Orsay dont la voûte à caissons se reflète dans un miroir d’eau, évocation des thermes de Caracalla ou de la basilique de Maxence à Rome.
Ils mettent l’accent est mis sur les métamorphoses de Paris, vénitienne dans l’étroite Rue de Bièvre, romaine dans la gare d’Orsay, fantastique ailleurs, avec ces pavés flottants qui créent une nouvelle ligne de sol ou bien l’eau jaillissant en cascade des bouches de métro devant la gare Saint-Lazare.
L’anecdotique trouve toutefois sa place dans cette nouvelle physionomie, comme cette photo de déchets ménagers arrêtés par le tablier d’un pont, parmi lesquels les taches claires des pelures d’orange attirent tout de suite l’œil. Même les problèmes les plus délicats posés par l’inondation, comme l’évacuation des ordures, deviennent poétiques une fois esthétisés par l’œil des photographes.
Les modèles guillerets des photos semblent indiquer que malgré les difficultés du quotidien, une partie des habitants au moins avait conscience de vivre un moment historique. Certains ont peut-être posé sur ces paysages noyés un regard proche de celui des photographes « envoyés spéciaux ». Ainsi cet homme peignant derrière son chevalet planté sur une plage de limon quai des Grands Augustins, où les péniches, portées par le niveau de l’eau, dressent leurs longues coques sombres derrière le haut parapet et jettent un coup d’œil curieux, prêtes à passer de l’autre côté.
Ce n’est ni la nouveauté du phénomène ni son ampleur qui font de la crue de 1910 une première mais l’irruption du photo-reportage dont la dimension lucrative n’échappa pas au Journal des Débats. L’actualité brûlante une fois refroidie et la soif de sensationnel ayant trouvé d’autres objets, l’intérêt documentaire et esthétique demeure, le fantasme, devenu réalité pendant quelques semaines, d’une ville noyée.
Ouvert du mardi au dimanche de 11h à 19h
Le Louvre des Antiquaires
2 Place du Palais Royal
75001 Paris
www.louvre-antiquaires.com
Merci à Pierre-Marie pour les photos...
Très beau reportage. Quand j´étais à Paris je voyais les traces mis en relief de cette crue.
RépondreSupprimerÀ bientôt
Elisa, Argentine
Oui, le promeneur attentif peut en remarquer un peu partout le long de la Seine (et peut-être ailleurs, je ne sais pas). C'est assez impressionnant...Personnellement je n'ai pas hâte d'assister à une crue, je préfère regarder des photos au sec!
RépondreSupprimerBon article, comme d'habitude. Et bonne expo qui nous fait découvrir un Paris de (presque) science fiction. Notre envirronement quotidien, avec un étrange décallage.
RépondreSupprimerEt puis il y a cette photo des pavillon de l'exposition universelle de 1900...
paris-plage quoi...Mais avec un peu trop d'eau et pas assez de soleil!
RépondreSupprimerMerci pour ce beau texte.
RépondreSupprimerC'est vrai que c'est amusant de voir ces deux bonnes femmes (accompagnées de Dupont et Dupond, t'as vu?) rester stoïques devant la situation. Elles semblent vraiment poser toutes les deux. Celle qui est assise se tient de 3/4 comme pour un portrait. Je me demande à quoi pourrait ressembler la même scène, filmée au tél portable, aujourd'hui.
ils sont partout Dupond et Dupont!
RépondreSupprimerje pense qu'aujourd'hui ça serait tjs aussi galère, sauf pour les enfants qui seraient contents de ne pas aller à l'école...et les photos prises par les téléphones seraient sûrement moins belles...